Vivre le Carême en tant que personne homosexuelle catholique
Écrit par Robert, un jeune gay catholique de l’Afrique de l’Ouest
Le Carême est pour moi un temps de réflexion, de prière et de renouveau intérieur. C’est un moment où j’essaie de me rapprocher de Dieu, non par la peur ou la culpabilité, mais par la conscience de son amour inconditionnel. Malheureusement être homosexuel et catholique signifie vivre cette saison avec un double défi et une double grâce : d’une part, la confrontation avec une Église qui peine parfois à accepter pleinement les personnes LGBTQ+, et d’autre part, la certitude que Dieu regarde le cœur et appelle chaque personne à la sainteté selon son propre chemin.
Cette une période qui m’invite à reconnaître les blessures, mais aussi à redécouvrir l’espoir. C’est le moment où je me souviens que le jeûne le plus important est celui de la haine et du jugement, et que la plus grande charité est celle de l’acceptation, tant envers les autres qu’envers moi-même. Dans ce voyage de quarante jours, la croix du Christ devient un symbole d’amour qui embrasse tout le monde, sans exclusion.
Il est pour moi un voyage de vérité et de confiance : un temps pour me réconcilier avec Dieu, avec l’Église et avec ma propre identité, sachant que l’amour du Christ appelle chacun à vivre pleinement et authentiquement.
Pendant le carême, je me donne le temps de réfléchir à la signification de la croix et à son message d’amour et de rédemption. Le Christ a souffert par amour, pour donner à chacun la possibilité de renaître, de se sentir accueilli dans le mystère du salut. Cette pensée me console et me donne de la force lorsque je sens le poids du jugement ou de l’incompréhension. Elle me rappelle que ma foi ne dépend pas des opinions humaines, mais d’un Dieu qui est Père et qui aime chacun de ses enfants de manière inconditionnelle.
Le fait d’être homosexuel et catholique m’a appris que la véritable conversion n’est pas un changement d’identité, mais une transformation du cœur, une invitation à vivre avec plus de foi, d’espérance et de charité. Le Carême est une occasion d’apprendre à pardonner, même à ceux qui ne comprennent pas mon être et mon humanité, et de demander à Dieu la grâce d’être un instrument de paix et de réconciliation.
Les pratiques du Carême – le jeûne, la prière et l’aumône – revêtent pour moi une signification particulière. Jeûner, ce n’est pas seulement se priver de quelque chose, c’est l’occasion de se libérer de tout ce qui m’éloigne de Dieu et de ma véritable essence. Prier, c’est trouver chaque jour un moment de dialogue avec Lui, sans crainte d’être indigne, mais avec la certitude d’être écouté et aimé. L’aumône n’est pas seulement une aide matérielle, mais aussi un acte d’acceptation envers les autres, une occasion de témoigner que l’amour chrétien est universel et inclusif.
La fin du carême est la Pâques, la fête de la résurrection, de la victoire de la vie sur la mort. C’est le signe que toute souffrance, tout malentendu, toute difficulté peut être rachetée. Et pour moi, comme pour beaucoup d’autres chrétiens LGBTQ+, c’est le plus grand espoir : celui d’une Église qui, comme le Christ, sait s’élever dans l’amour et l’acceptation, car ce n’est qu’ainsi qu’elle peut vraiment être le reflet de Dieu dans le monde.
Le Carême n’est donc pas seulement un temps de sacrifice, mais un chemin d’espérance et de renaissance. Au cours de ces quarante jours, je me sens appelé à regarder honnêtement en moi, à reconnaître mes fragilités, mais aussi la beauté de ce que je suis. Être homosexuel et catholique n’est pas une contradiction, mais une réalité que je vis dans la foi, en essayant chaque jour de réconcilier mon identité avec l’Évangile.
Souvent, le plus grand défi n’est pas la relation avec Dieu, que je sens proche et aimant, mais la relation avec une communauté ecclésiale qui ne parvient pas toujours à refléter pleinement cet amour. Parfois, je me suis demandé s’il y avait vraiment de la place pour moi dans l’Église, si je pouvais m’y sentir accueilli sans réserve. Le Carême devient alors aussi un temps de réconciliation avec cette question, une occasion de rester ferme dans ma foi sans laisser la douleur de l’incompréhension m’éloigner de ce que j’aime.
Sur ce chemin, Jésus lui-même est un exemple pour moi. Il a marché dans le désert, a affronté la tentation, a connu le rejet et la solitude, mais a continué à donner de l’amour. Son regard ne s’est pas arrêté aux apparences ou aux étiquettes sociales, mais il a pénétré dans le cœur des gens, reconnaissant en chacun la dignité d’un enfant de Dieu. C’est pourquoi je me demande : si le Christ n’a jamais rejeté personne, pourquoi devrais-je me sentir exclu de son étreinte ?
Sans doute chaque carême m’apprend quelque chose de nouveau. Il m’aide à cultiver la patience, à accepter mon temps et celui de l’Église, à ne pas répondre au rejet par la colère, mais par le témoignage de ma foi vécue avec authenticité. Il m’invite à ne pas laisser la peur me pousser à me cacher, mais à vivre ouvertement comme un chrétien qui croit en l’amour de Dieu pour chaque personne.
Et puis vient la Pâques! Le moment où toute peine se transforme en joie, où la nuit fait place à la lumière. Pour moi, c’est la plus grande promesse : que malgré les difficultés, l’amour de Dieu est plus fort que n’importe quel obstacle. Qu’il y a une place pour moi dans son Église, et que son Royaume est composé de personnes différentes, unies par le même appel à l’amour et à la vérité.
En fin de compte, vivre le Carême en tant que personne homosexuelle et catholique signifie embrasser cette vérité : que Dieu m’a créé tel que je suis, et que ma foi n’est pas en contradiction avec mon identité, mais fait partie intégrante de mon cheminement vers Lui.
Au terme de ce voyage de carême, j’emporte avec moi une certitude : la foi n’est pas un privilège accordé à quelques-uns, mais un don que Dieu offre à tous, sans condition. Le véritable sens de cette période de carême n’est pas seulement le sacrifice, mais la préparation à la renaissance, à la joie de Pâques, à la certitude que l’amour l’emporte toujours.
Ça a l’air facile à le dire mais ce n’est pas toujours le cas. C’est un chemin que je choisis de suivre avec foi et espoir. Malgré les difficultés, je crois en une Église capable de grandir, d’écouter, d’accueillir. Je crois en un Dieu qui aime chacun de ses enfants et qui m’appelle à le suivre sans peur, sans honte, avec un cœur ouvert à sa grâce.
Particulièrement ce Carême m’a rappelé que mon identité n’est pas un obstacle à la sainteté, mais qu’elle fait partie du merveilleux projet que Dieu a pour moi. La croix n’est pas un poids écrasant, mais un pont vers la lumière de la résurrection. Et avec cette espérance dans mon cœur, je me prépare à vivre Pâques avec la joie de savoir que je suis aimée de Dieu exactement comme je suis.